Mardi 14 avril, le gouvernement a présenté un projet d’ordonnance visant à imposer aux personnels des versants Etat et Territorial, la prise obligatoire, la réquisition de cinq à dix jours de RTT et de congés annuels selon des modalités diversifiées, sur la période courant du 16 mars à la fin du confinement.
Cette ordonnance vient d’être publiée au Journal officiel.
Le gouvernement prévoit que la quasi-totalité des fonctionnaires perdront une semaine de RTT, ou congés, et que les plus modestes en perdront deux. Pour les agents en télétravail (beaucoup de catégories A) une semaine de RTT perdue. Pour ceux dont les missions ne sont pas « télétravaillables » (l’essentiel des catégories B et C) cela sera dix jours en moins (RTT et CA).
Pour la FSU cette ordonnance est en totale contradiction avec les discours présidentiels saluant l’engagement des personnels de la Fonction publique. En adoptant une telle orientation, le gouvernement rend les personnels responsables de sa propre incurie et de situations imposées par le confinement : fragilités de santé, gardes d’enfants ou impossibilité d’exercer leurs fonctions en télétravail (souvent par manque de matériel professionnel disponible).
Cette proposition est d’autant plus déplacée qu’il y a beaucoup à dire sur les choix politiques antérieurs en matière de prévention et de mise à disposition en quantité suffisante des équipements de protection, comme les masques par exemple, ou de la capacité de dépistage.
Cette ordonnance instaure une mesure vexatoire, arbitraire et infondée au regard de la situation des personnels qui se trouvent aujourd’hui d’abord en situation de travail empêché. Les plus nombreuses à en faire les frais seront les femmes, notamment celles employées sur des fonctions d’exécution.
Cette mesure est d’autant plus autoritaire et injuste que tous les personnels, loin s’en faut, ne vivent pas « confortablement » leur confinement.
La FSU dénonce les « deux poids, deux mesures » du caractère rétroactif au 16 mars des dispositions instaurées par l’ordonnance alors même que le gouvernement avait refusé d’envisager la suspension rétroactive du jour de carence en cas d’arrêt pour raison de santé !
Dans notre ministère, une solution « alégale » a été choisie pour beaucoup d’agents : le « travail à distance en mode dégradé ». Nous réclamons qu’ils soient tous considérés comme télétravailleurs au regard de cette ordonnance.
Nous exigeons, déjà depuis trois semaines, au niveau du ministère mais aussi au niveau des services ou des établissements :
– que chaque agent reçoive une information claire et personnalisée sur son statut depuis le 16 mars : télétravail, travail à domicile, ASA (autorisation spéciale d’absence), arrêt de travail.
– que chaque agent reçoive rapidement un rappel des règles retenues pour le travail à distance (TAD), pour les ASA, pour le travail en présentiel (sur site), au regard des nouvelles règles, et des conséquences de l’ASA et du TAD .
– la communication par service, ou pôle, des tableaux d’affectation (situation administrative des agents : télétravail, TAD, ASA, Arrêt -sans précision-)
La méthode de déconfinement reste très floue dans les discours gouvernementaux.
Tout un chacun sait pertinemment que, pour assurer leurs missions de service public, il sera demandé aux personnels dans les prochains mois des efforts encore plus importants que ceux qu’ils assument déjà (et qui étaient déjà insupportables compte tenu des restrictions d’effectifs, RGPP et autres réformes). Et voilà que cette ordonnance confirme le choix d’une « politique du bâton » privative de droits.
Voilà qui augure mal de la période à venir ! Visiblement, le « monde d’après » que le Président de la République a commencé d’esquisser lundi soir reprend les poncifs de la stigmatisation des agent-es de la Fonction publique comme cela prévaut depuis deux ans maintenant.
Il n’a tiré aucune leçon de l’importance des services publics (santé, enseignement, organisation de la vie en société…) mis en lumière par la crise.
Le gouvernement serait bien mieux inspiré de se soucier du soutien psychologique des personnels de la Fonction publique, et de préparer la période de déconfinement qui intègre la reconnaissance de leur engagement et de leurs qualifications par la revalorisation des carrières et de rémunérations.
Le SNAC-FSU exige du gouvernement le retrait de cette ordonnance injuste et vexatoire.