Dernières nouvelles du rapport sur l’emploi contractuel à la Culture

Chers collègues,

Comme vous le savez, les personnels de notre ministère étant à plus de 50 % des non-titulaires, nous sommes très intéressés par le rapport IGAC n° 2022-07 « issu de la Mission interministérielle sur l’emploi contractuel au ministère de la Culture et dans ses établissements publics ».

Pour être plus précis, rappelons qu’il s’agit d’un rapport établi conjointement par l’IGAC (notre inspection à nous) et l’IGF (celle des Finances) suite à une mission pour laquelle nous avons été, comme toutes les organisations syndicales du ministère, auditionnés en janvier 2022.

Depuis, plus rien : le rapport est remis en toute discrétion en mars 2022 pour tomber aussitôt dans un oubli profond.

Enfin, pas de notre côté : ne voyant rien venir au bout d’un an et demi, le 7 novembre 2023 la FSU Culture demande communication du dit rapport à la ministre d’alors. AUCUNE REPONSE.

Du coup, le 5 décembre, lors d’un entretien bilatéral, nous lui demandons directement le rapport. Réponse de la ministre : « On ne souhaite pas vous le donner parce qu’il s’agit d’un mauvais rapport, plus un texte philosophique qu’un vrai rapport administratif, et il n’y a rien dedans d’intéressant pour vous. »

Un peu interloqués par l’arrogance de la réponse, il nous vient une question : S’il n’y a rien dans le rapport, pourquoi la ministre, conseillée par toute la technostructure habituelle, refuse-t-elle de nous le donner ?

Intéressant : au moment même où est étudiée la révision du cadre Albanel (le cadre de rémunération des contractuels payés par la centrale), qu’est-ce qu’on ne doit pas voir ? Qu’est-ce qui fout une telle trouille à Nôzénarques pour imposer cette omerta ?

Piqués par la curiosité, et un peu énervés d’être pris pour des billes par notre ministre, nous déposons le 8 décembre une demande de communication du rapport auprès de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA).

Le 2 février, la CADA répond conjointement à la FSU Culture et à l’administration par un avis qui se termine ainsi :

«  Compte tenu du laps de temps significatif qui s’est écoulé depuis la date à laquelle ce rapport aurait dû être rendu public, et dans la mesure où elle n’a connaissance d’aucune décision susceptible d’être prise sur le fondement de ce rapport, la commission estime que ce document a perdu son caractère préparatoire. (…)

Elle estime, dès lors, que ce dernier est librement communicable, après occultation des éventuelles mentions relevant des secrets protégés.

Elle émet, dès lors, un avis favorable à la demande sous cette réserve»

Tout heureux de constater que certains éléments de démocratie survivent encore dans notre beau pays, nous attendions la suite.

Et la suite arrive. Le 16 février, nous recevons ce message de la part du chef du SRH :

« Après un examen approfondi de l’avis rendu par la CADA, nous estimons que le caractère préparatoire de ce rapport est encore d’actualité car la négociation ouverte est toujours en cours.

Nous contestons donc le caractère immédiatement transmissible du rapport et nous engageons, en revanche, à le transmettre dès que la première étape de négociation 2024 aura pu être conclue. »

Donc la CADA, considérant qu’ils n’ont pas fichu grand-chose depuis deux ans, estime que le rapport est immédiatement communicable puisque visiblement il ne prépare à peu près rien en termes de décision (il est d’ailleurs indiqué dans l’avis que « La commission précise qu’un document ne revêt un caractère préparatoire au sens de ces dispositions que lorsqu’il est destiné à éclairer l’administration en vue de prendre une décision administrative déterminée et que cette décision n’est pas encore intervenue ou que l’autorité compétente n’a pas manifestement renoncé à la prendre à l’expiration d’un délai raisonnable, apprécié selon la nature et la difficulté de la décision préparée. »).

Et le ministère, mauvais joueur jusqu’au bout, s’assoie tranquillement sur l’avis de la CADA en soumettant la communication du rapport à la signature par les organisations syndicales de l’accord qu’ils sont en train de nous préparer !

Autrement dit : « Si vous êtes sages et que vous signez notre texte, on vous remettra peut-être le rapport qui aurait pu vous servir à le négocier. » Malin, non ? C’est qu’ils sont ficelle, Nôzénarques.

Donc, pas de vraie négo, une parfaite mauvaise foi concernant le caractère communicable du rapport (puisque la seule décision prévisible est celle d’enfumer les organisations syndicales), et un petit chantage mesquin pour nous pousser à accepter leur solution (on a l’habitude, ils font ça tout le temps – sur tous les dossiers, un petit chantage, et hop !).

En tout cas, leur petit jeu aura eu au moins un résultat : alors que ce rapport était totalement enterré et que plus personne n’y prêtait attention, leur entêtement a eu pour effet de le mettre tout en haut du hit-parade des textes intéressants (en témoignent les réactions à notre communiqué du 8 décembre). Alors même que personne, sauf l’administration, ne sait ce qu’il contient.

Non, vraiment, bien joué les gars, encore bravo !

Tout cela est bien lamentable, et, pour le dialogue social loyal et de qualité, on repassera.

Bon, et maintenant ?

Nous étions plutôt bien disposés pour signer l’accord de révision du cadre Albanel, mais comme on nous prend pour des crétins, il est probable qu’on va y réfléchir à deux fois. Alors qu’on se dirigeait vers une signature de tout l’arc syndical, il est donc fort probable que, par leur faute, il y aura un peu de mou dans l’arc. Le chantage, ça va bien cinq minutes…

Dès maintenant, nous allons demander communication du rapport à notre nouvelle ministre, que nous n’avions pas saisie directement jusque-là, considérant qu’elle n’était pour rien dans tout ce bazar. Comme elle a l’air moins craintive que ses prédécesseurs (et que Nôzénarques, ça va sans dire), on aura peut-être une bonne surprise.