Le président du CNC a adressé mardi une dépêche à tous les agents justifiant la poursuite de son mandat malgré sa mise en examen et son placement sous contrôle judiciaire.
Cette dépêche n’a fait qu’accroître le malaise d’une grande partie du personnel. Tous les lieux communs dans ce genre d’affaires ont été développés :
– Je récuse totalement ces accusations,
– Que la justice puisse faire son travail,
– Je suis parfaitement serein quant à l’issue de la procédure,
– La présomption d’innocence est un principe fondamental,
– Des faits sans aucun rapport avec l’exercice des fonctions qui m’ont été confiées,
L’affichage par le président du soutien de très nombreux agents du CNC dans cette dépêche passe très mal dans une affaire présentée comme uniquement d’ordre privé, et notamment après l’injonction qui nous a été faite de respecter la plus grande neutralité, voire le silence.
En tant que fonctionnaire ou agent contractuel nous sommes soumis à l’obligation de réserve. Celle-ci pose comme principe l’interdiction de faire de sa fonction l’instrument d’une propagande quelconque et d’éviter en toutes circonstances les comportements portant atteinte à la considération du service public.
Notre établissement doit-il servir de tribune aux dénégations de culpabilité du président Boutonnat et prendre à parti les agents concernant une affaire présentée comme strictement privée ?
Pour les agents, le constat prédominant, sans même prendre parti et en respectant strictement la présomption d’innocence est que l’image du CNC est abîmée et que le maintien du président ne leur permet pas de poursuivre leurs missions dans la sérénité.
Le président déclare en conclusion qu’il sait pouvoir compter sur notre engagement, mais est-ce vraiment la question ? Evitons la confusion des genres, le CNC peut compter comme il a toujours pu le faire sur l’engagement professionnel indéfectible des agents. Mais dans ce contexte si particulier, le président attend-il un soutien personnel en commençant la dépêche par cher(e)s ami(e)s ?
Cette situation nuit durablement à l’image du CNC, jusqu’alors institution respectée et plébiscitée par les professionnels.
Nos interlocuteurs professionnels, cercle d’amis ou familial ne se privent pas d’ironiser sur cette situation. Et comment pouvons-nous être crédibles, en demandant aux professionnels de suivre des formations et de remplir des formulaires concernant la lutte contre les violences sexistes et sexuelles ? De nombreux agents ne veulent plus se prêter à cette mascarade et ont fait remonter leur malaise. Ce sont des voix que le président devrait être en mesure d’entendre.
Nous comprenons l’impérieuse nécessité pour le président de se maintenir à son poste en tentant de démontrer par là qu’il reste serein face à des accusations qu’il rejette en bloc.
Ce malaise peut perdurer, puisqu’une instruction dure de très longs mois et ce n’est pas le conseil qui a été donné dans les services de recourir à la cellule psychologique d’écoute du ministère pour les agents troublés et pris dans un conflit de valeurs qui est susceptible de régler cette question.
La Ministre de tutelle considère que « c’est à lui (le président), en toute rigueur, de décider ». Renvoyer l’homme à sa conscience personnelle et professionnelle est une manière de laisser la situation se déliter au détriment de la réputation de l’établissement et de la sérénité des agents dans l’accomplissement de leurs missions.
Comme l’ont signifié un certain nombre d’organisations professionnelles le statut quo n’est pas tenable et nous doutons que la cérémonie des Césars qui approche apporte de l’apaisement.