L’occupation des théâtres : Une lutte qui se propage partout sur le territoire !

Défense de la Culture, dénonciation d’une politique sanitaire incohérente, lutte contre la réforme de l’assurance chômage, solidarité avec tous les mouvements sociaux…

Nous sommes tous concernés !

Depuis plus d’un mois, théâtres et centres culturels « non essentiels », fermés sans perspectives de reprise, sont occupés. Le silence du ministère, très remarqué, est à la mesure de son impuissance dans un contexte politique qui ne laisse à la ministre aucune marge de manœuvre et la cantonne dans un rôle de passe-plats.

On peut comprendre que la gestion sanitaire d’une telle épidémie soit difficile mais l’incohérence et l’inégalité des mesures prises depuis un an deviennent de plus en plus insupportables. Changements de pied, non reconnaissance des erreurs, manque de pédagogie, autoritarisme démesuré, gestion bureaucratique exacerbée, services publics malmenés et affaiblis… avec pour seule voix autorisée un président monarque qui décide seul en son bureau et fait connaître au dernier moment sa volonté. Cela finit par lasser, insupporter, révolter !

Et ce sont les gens du spectacle, comédiens, musiciens, danseurs, bateleurs, régisseurs, techniciens, étudiants, stagiaires… tous les métiers du spectacle, niés, malmenés, dépouillés, qui aujourd’hui portent le plus fort cette dénonciation et la revendication d’autre chose, d’un autre monde.
Travailleurs précaires, intermittents, ils sont sur le fil d’accords sans cesse amoindris.
Ils demandent la réouverture des lieux, certes, mais surtout des mesures qui permettent la survie et un avenir pour la majorité d’entre eux, la prolongation de l’année blanche au-delà de l’été et son élargissement à tous les précaires et saisonniers. Plus généralement, ils dénoncent la réforme de l’assurance chômage que le gouvernement est en train de mettre en place furtivement, et qui va toucher de plus en plus de personnes.

La première occupation est celle de l’Odéon le 4 mars. Le symbole est fort, et l’évocation de mai 68 revendiquée. Des AG quotidiennes décident des actions, des agoras et des interventions se tiennent sur le parvis. Des bannières flottent sur la façade et appellent à l’élargissement des luttes.

Le mouvement se répand, et le mois de mars voit les occupations se multiplier sur le territoire. Plus d’une centaine en ce mois d’avril.

Sans exhaustivité, on peut citer :
Dans les Hauts de France : Calais, Béthune, Lille, Douai, Noyon, Laon…
Dans le grand Est : Charleville, Reims, Nancy, Strasbourg…
En Normandie : Le Havre, Rouen, Cherbourg, Caen, Dreux…
En Ile de France : Paris (Odéon et la Colline), Montreuil, Rosny, Aubervilliers, Chilly-Mazarin, Gennevilliers, Asnières, Saint-Denis…
En Bretagne : Rennes, Brest, Morlaix, Saint-Brieuc, Lorient, Quimper, Redon, Lorient…
Dans les Pays de la Loire : Nantes, Angers, Laval, Saint-Nazaire, Le Mans, La Roche-sur-Yon…
Dans le Centre : Orléans, Tours, Blois, Bourges, Tours, Châteauroux…
En Bourgogne-Franche-Comté : Dijon, Chalon-sur-Saône, Mâcon, Besançon, Lons-le-Saunier, Bourg en Bresse…
En Auvergne-Rhône-Alpes : Lyon, Villeurbanne, Saint-Étienne, Clermont-Ferrand, Grenoble, Montluçon, Aurillac…
En Nouvelle Aquitaine : Tulle, Niort, La Rochelle, Angoulême, Limoges, Périgueux, Bordeaux, Mont de Marsan, Auch, Bayonne, Pau…
En Occitanie : Toulouse, Millau, Montpellier, Sète, Alès, Mende, Nîmes…
En PACA : Marseille, Arles, Avignon, Valence, Gap, Die, Briançon, Nice…

Bien d’autres encore, avec des formes variées, occupation ou non, tolérée voire soutenue – ou non – par les municipalités. Des théâtres, des centres culturels, des conservatoires, des écoles des beaux arts, des centres d’art… On peut les retrouver, cartographiés au fur et à mesure – dans la limite du possible – sur un blog de Mediapart « Météo très ensoleillée du monde de la culture qui occupe les théâtres et se mobilise »

La jonction se fait avec le mouvement social : manifs contre les violences policières ou la loi sécurité globale, soutien aux personnels de la Santé, lutte des femmes, des migrants, des étudiants, des retraités, et en premier lieu dénonciation de la réforme du chômage…
Les modes d’action se diversifient avec la multiplication des collages, avec des slogans forts : « No (s) Culture (s) No Futur (s) », « On ne joue plus, on lutte »… Les flashmobs et la chanson de HK « danser encore » rassemblent de plus en plus de monde. Des performances montrent des corps gisants sur le pavé, nus et peints de slogans, évocation du coup d’éclat de Corinne Masiéro.

Et face à ce mouvement de fond, qui couvre tout le territoire, le grand silence du Gouvernement.

Roselyne Bachelot s’est rendue à l’Odéon le 6 mars, sans aucune proposition. Interpellée plus tard au Sénat, elle juge « inutiles et dangereuses » les occupations des théâtres, et assure qu’elle va protéger les droits des intermittents et que des annonces fortes vont être faites.
Mais le gouvernement ne suit pas, et la communication du ministère fait surtout ressortir des actions essentielles telle la remise d’une décoration à Michel Sardou ou la défense de la baguette parisienne ! Puis la séquence de son hospitalisation covidienne.

On pourrait penser qu’une telle situation soit suivie de près par les médias mainstream. Mais là encore, peu de choses. L’information est essentiellement locale, éparpillée, noyée. Ou sur les circuits en boucle des réseaux sociaux. Quasi rien sur les chaînes d’info depuis les quelques flashes du début sur l’Odéon ou le « scandale » Masiéro aux Césars. Ce dont on parle, c’est des rassemblements non autorisés, en faisant l’amalgame entre les teufeurs, les inconscients, les excédés, et les militants.
L’état d’urgence permet d’interdire, disperser, verbaliser les représentations et les agoras sur les parvis. Récemment c’est la musique elle même (et non le rassemblement) qui a été interdite dans les rues de Paris ou de Lyon.

Le gouvernement choisit délibérément le silence en espérant qu’il permette d’étouffer et d’enterrer discrètement ce mouvement qui l’inquiète. Quitte à passer à la répression par la suite, comme d’habitude.

Cela ne doit pas être. L’occupation des théâtres est un signal fort du malaise de la Culture et de la montée des mécontentements. Nous en sommes solidaires.

L’appel intersyndical à la journée d’action du 23 avril, puis aux manifestations du 1er mai, montre la convergence de toutes ces luttes, et les théâtres y prendront toute leur place.

Soyons y nombreux.

Des cortèges sont prévus dans toute la France.
A Paris, RV 14h place d’Italie.
A Lyon, trajet prévu TNP-Opéra…

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