Maryannick Chalabi, 9 février 2025
Cela suffit avec ces litanies de gouvernements successifs, et reprises en choeur par le gouvernement actuel, sur « qu’est-ce-qu’être français ?, les « valeurs républicaines », les « droits » et « devoirs » du citoyen, le « mode de vie à respecter ».
Quels droits ? celui de se voir imposer des lois par une succession de 49.3 ?
Quelles valeurs républicaines ? L’égalité rabâchée entre les hommes et les femmes ? en dépit de multiples lois votées et revotées, quelle égalité salariale en 2025 ? Combien de députés, de ministres, et jusqu’à un candidat au seuil de la présidentielle, entre autres, ont été poursuivis, et pour beaucoup condamnés, pour agressions sexuelles ?
Quelles valeurs républicaines pour un pays où :
– un ancien premier ministre et candidat à la présidentielle est condamné (jugement en appel) pour détournement de fonds publics ?
– l’ancien président de la république, qui s’est permis de voler le téléphone d’un proche, passe son temps de tribunaux en tribunaux, de condamnations en condamnations, et vient d’être condamné à un an de prison ferme et au port d’un bracelet électronique ?
– le président de la république choisit comme président du conseil constitutionnel (sage parmi les sages, normalement) un ancien ministre impliqué dans plusieurs affaires de détournements et prises illégales d’intérêt ?
Qu’est-ce-que le mode de vie français ? Celui d’un président allant fêter son élection au Fouquet’s, ou celui de milliers de personnes faisant la queue aux resto du coeur ?
Quel rapport entre le mode de vie des 30 français les plus riches, avec en tête Bernard Arnault (150 milliards d’euros) et les plus de 9 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté monétaire ; ce seuil qui était de 1216 € par mois pour une personne seule en 2022 est à mettre en relation avec le montant du SMIC qui était à cette date de 1302 € !!!
De quel droit B. Retailleau peut-il seulement penser définir quel doit être notre mode de vie, le vôtre, le mien, celui des 68 millions d’habitants de ce pays ?
Les députés attachés au maintien de la présence française dans les territoires d’outre-mer, « élus certes démocratiquement », n’hésitant pas à piétiner la constitution, viennent de voter un texte limitant le droit du sol à Mayotte. Cela signifie que Mayotte n’est pas la France, que ces députés considèrent ce département comme une colonie où un certain nombre d’habitants, et en particulier les non-métropolitains, n’ont pas les mêmes droits que les « Français ».
Encore et toujours, le serpent de mer nauséabond du racisme ressurgit. Pas un jour où un membre de ce gouvernement ne fasse une déclaration alimentant la xénophobie. Cela englobe de petites circulaires qui pourraient passer inaperçues, comme celle, renforcée à partir du 1er janvier 2025, qui réglemente le choix des prénoms pouvant être inscrit à l’état-civil, interdisant les lettres et accents « ne faisant pas partie de l’alphabet français traditionnel », et ciblant aussi bien des prénoms bretons que turcs par exemple ; le ridicule de cette mesure ne doit pas masquer son caractère discriminatoire. Cela concerne aussi les déclarations du ministère de l’intérieur développant sa propre conception de l’état de droit, et réitérant le 6 février en s’en prenant aux « règles juridiques qui entravent » [les décisions du ministère de l’intérieur] et réclamant une fois de plus un référendum sur l’immigration.
Les principes de la république sont fondés sur les libertés individuelles et collectives. Toute distinction entre les habitants, au nom d’une quelconque « préférence nationale », est une remise en cause de ces prinipes.
Et pendant ce temps, alors que ce gouvernement multiplie les mesures favorisant les thèses du Rassemblement national, les extrêmes droites européennes, financées sans retenue par Elton Musk, se réunissent à Madrid. Marine Le Pen s’y félicite de l’élection de Trump, « véritable basculement mondial », ouvrant la voie vers le « retour des nations… et la fin de la mondialisation », sauf pour le grand capital bien sûr.
