
Le service public de l’archéologie sous le coup d’attaques inédites : le dispositif de l’archéologie préventive en danger
Détournement du financement (Taxe d’Archéologie Préventive)
L’INRAP saboté par les cost killers, et des services territoriaux sous-dotés …
Par la loi de 2001, l’archéologie s’autofinançait tant bien que mal, grâce à la Redevance d’Archéologie Préventive (RAP), taxe affectée, qui alimentait : le Fond National pour l’Archéologie Préventive (FNAP), l’INRAP et les services de collectivités. Depuis que la redevance a été remplacée par une Taxe d’Archéologie Préventive (TAP), les fonds ne sont plus versés à l’archéologie, mais à Bercy, qui garde l’essentiel pour le budget de l’État. Les conséquences sont critiques :
- Insuffisance chronique du financement des missions de service public de l’INRAP (diagnostics et recherche), aggravée aujourd’hui par des mesures d’austérité aberrantes décidées par une direction en fin de règne. En 2024, ce défaut de financement se traduit par un déficit de 15 millions d’euros, non compensée par la très forte activité du secteur concurrentiel (fouilles) et la décision de réduire drastiquement les moyens d’intervention sur le terrain en 2025.
- Financement insuffisant des services de collectivités pour les diagnostics réalisés, alors que leur action est indispensable à toutes les échelles.
- FNAP sous-doté, qui ne peut plus aider les aménageurs, notamment publics, qui demandent une subvention.
Des Services régionaux de l’archéologie désarmés et empêchés,
Après plusieurs années d’une remarquable atonie, la Sous-Direction de l’Archéologie semble avoir été réanimée sous la pression de la direction de l’INRAP…
Une lancinante ritournelle partie de la rue d’Alésia (siège de l’INRAP) est parvenue rue de Valois et rue des Bons Enfants (siège du Ministère de la Culture et de son administration centrale) : Les archéologues des SRA seraient irresponsables, ils prescriraient trop d’opérations, il y aurait un « stock » croissant d’opérations restant à mener … et beaucoup trop de leurs prescriptions ne sont pas « rentables » car ne rapportant pas assez de contrats de fouille…
Le bilan scientifique de l’archéologie préventive est largement reconnu et les opérations de diagnostics participent largement à améliorer nos connaissances et à la protection du patrimoine. Les diagnostics participent largement au financement de l’archéologie préventive (en particulier au financement des services de collectivités.
La note sur les installations photovoltaïques envoyée mi-mars par la SDA aux DRAC et Conservateurs régionaux de l’archéologie est édifiante…
On peine à connaître la part du travail de lobbying mené par les aménageurs et celui mené par la direction de l’INRAP, mais de fait cette directive est orientée à charge contre les capacités des SRA à évaluer le bien-fondé de leurs décisions.
Il est inacceptable de remettre en cause les prescriptions d’archéologie préventive sur le photovoltaïque sous le prétexte fallacieux qu’elles seraient émises pour de mauvaises raisons (« faire des trous pour faire des trous »). Certains manques dans les arguments techniques, pourtant si précis sur certains points, interrogent : par exemple, l’absence de mention des éventuels terrassements du terrain préalables aux installations de panneaux, inévitables lorsque les terrains ne sont pas plans…
Si cette note est appliquée à la lettre, elle impactera notre rôle d’évaluer au cas par cas l’intérêt de mettre en œuvre ou non une opération d’archéologie préventive, pour répondre aux missions des Services régionaux d’archéologie : Étudier, Protéger, Transmettre.
De même, la nouvelle note de la SDA, en date du 17 mars 2025, dénommée « La demande d’information sur la sensibilité archéologique d’un site suivie, le cas échéant, d’une demande anticipée de prescription d’archéologie préventive » fait peser sur les agents des SRA une pression supplémentaire inacceptable dans le contexte de sous-effectif et de surmenage chroniques, en retenant les délais réglementaires les plus restrictifs, en contradiction avec la pratique administrative et la jurisprudence. Ainsi les SRA qui n’auraient pu établir dans les 10 jours la non-complétude d’une demande d’information présentée par un aménageur pourrait se retrouver dans l’incapacité de prescrire une opération d’archéologie préventive pendant 5 ans !
Les services régionaux de l’archéologie sont donc aujourd’hui sommés de prescrire moins, de faire l’économie des demandes volontaires de diagnostic et d’éviter les diagnostics soi-disant « de précaution ».
Le ministère doit donner les moyens aux SRA d’exercer leurs missions. Ces services sont aujourd’hui exsangues : sous-effectifs chroniques, outils informatiques inadaptés et/ ou obsolètes, moyens de fonctionnement sabotés par des diminutions drastiques des enveloppes de frais de déplacement avec impossibilité d’exercer les missions d’accompagnement et de contrôle scientifique et technique des opérations, manque criant de Centres de Conservation et d’Études.
Nos organisations syndicales revendiquent donc une nouvelle fois :
- un retour à une taxe affectée ou le versement du produit de la TAP au financement de la mission patrimoine.
- un financement des missions de service public à la hauteur des besoins, pour l’INRAP, pour les services territoriaux habilités, pour les Services régionaux de l’archéologie ;
- un plan de recrutement à l’Inrap et des ouvertures de postes dans les SRA, avec les concours nécessaires.
L’intersyndicale SGPA CGT Culture, FSU Culture et SUD Culture Solidaires a donc déposé un premier préavis de grève du 01 au 04 avril 2025 en appelant à la mobilisation l’ensemble des archéologues à l’INRAP comme dans les Services régionaux de l’archéologie pour s’opposer au dépeçage silencieux du dispositif de l’archéologie préventive.
Pour en parler toutes et tous ensemble nous vous proposons de nous voir dans le cadre d’une AG en visio le mardi 1er avril 2025 de 12h à 13h en utilisant le lien suivant : meet.google.com/uod-zbqx-drb
