Nous nous opposerons à toute mesure réduisant le pouvoir d’achat des retraités et actifs.


CFE-CGC ; CFTC ; CGT ; FGR-FP ; FO ; FSU ; Ensemble & Solidaires.

La saisine du Premier Ministre, afin d’établir « un diagnostic sur les déséquilibres financiers de la sécurité sociale et d’identifier les leviers de rétablissement des comptes sociaux » n’est pas recevable dans le contexte particulièrement difficile pour les personnes âgées et pour le secteur de l’autonomie, à l’abandon, au bord du gouffre. On nous demande de trouver des économies de plusieurs milliards alors que notre système de santé est au bord de la rupture. La grande majorité des EHPAD publics sont en déficit chronique et les services d’aides à domicile asphyxiés, les personnes âgées de plus en plus ne recourent plus aux soins prescrits.

Les prochaines années verront une augmentation particulièrement importante du nombre des personnes âgées en perte d’autonomie. Nous d’acceptons aucune « piste » qui diminuerait le pouvoir d’achat des retraité·es comme de nos enfants, en particulier la désindexation partielle ou totale des pensions par rapport à l’inflation alors que les dépenses contraintes augmentent et notamment le coût des complémentaires santé, hélas indispensables pour se soigner, du fait même de la remise en cause et des attaques contre la Sécurité Sociale. Comment ces personnes âgées pourront-elles se soigner faute de personnels, faute de structures et faute de ressources suffisantes pour financer le reste à charge ?

Le HCFEA qui, dans son rapport du 20 février 2024, dit : « la politique française du vieillissement est caractérisée par un défaut notable d’anticipation et de planification« et de demander « d’inscrire dans la loi l’impératif de prise en compte […] des enjeux du vieillissement de la population et la garantie du droit des personnes âgées de vivre de façon autonome et en pleine citoyenneté, avec tous les soutiens nécessaires », réclamant, pour ce faire, « une planification de moyen long terme ».

L’augmentation des dépenses de santé dues au vieillissement de la population et au développement des techniques de soins est une évidence. Cette situation était tout à fait prévisible compte tenu de la pyramide des âges. Cependant aucune planification prévisionnelle n’a été faite ni même envisagée. Alors que les exonérations de cotisations sociales s’élèvent à 77 milliards pour la seule année 2025, alors que le gouvernement ne veut taxer ni les grandes fortunes ni les grandes entreprises qui bénéficient d’aides publiques sans contrepartie et qui ont redistribué 100 milliards de dividendes à leurs actionnaires en 2024, il vise les dépenses sociales publiques. La Sécurité sociale, les retraité·es, ne sont pas des variables d’ajustement de la dépense publique.

Faute de volonté politique pour prendre en charge la perte d’autonomie et résoudre les manques de personnels et le reste à charge exorbitant, l’Etat veut faire payer la population. La perte d’autonomie est un aléa de la vie et, à ce titre, relève de la prise en charge de la branche maladie de la Sécurité sociale. D’autres solutions sont possibles fondées sur une progression des recettes : réductions massives des exemptions de cotisations sociales, créations massives d’emplois pérennes et qualifiés dans le cadre de la réindustrialisation du pays, égalité salariale effective femmes/hommes, augmentation des salaires, lutte contre le chômage des jeunes et des seniors notamment, revenus du patrimoine, placements et dividendes soumis à cotisations etc.

Nous partageons, avec le projet d’avis, certaines approches et propositions.

Nous apprécions que dès l’introduction, l’avis rappelle fermement la nécessité et l’urgence d’une loi de programmation et de financement pour le grand âge avec une projection sur 10 ans. Il faut constater aussi que le Conseil de l’Âge (comme celui de la Famille) ne s’est pas seulement inscrit dans la recherche d’économies mais qu’il a insisté sur les besoins, l’exigence de réponses.

De même, nous nous retrouvons dans le propos qui insiste sur la nécessité d’une politique globale et pas simplement compensatoire. L’importance de la prévention à tous les âges de la vie sans barrière d’âge est un constat que nous partageons. À terme, elle est porteuse de dizaines de milliards d’économies. L’accent mis sur la prévention est essentiel : prévention tout au long de la vie et suppression de la barrière d’âge. Les investissements nécessaires à court terme permettront un progrès pour les personnes concernées et des économies : moindre glissement d’un GIR à l’autre, moindres hospitalisations, moindres dépenses de santé : gagner une année d’espérance de vie en bonne santé c’est 1,5 milliard d’économie ! De même, nous souscrivons à l’effort nécessaire qui doit être porté au logement personnel et à l’habitat partagé, sources de bien-être pour la personne et d’économies en termes de santé. Rappelons la nécessité de construire 108 000 places d’EHPAD d’ici 2030 selon la DREES.

Les analyses sur l’APA sont très pertinentes qui soulignent l’absence de prise en charge de toutes les personnes en perte d’autonomie notamment celles qui souffrent de troubles cognitifs. Le point d’alerte sur le « rapprochement des résultats de l’enquête autonomie et l’évolution du nombre de bénéficiaires à l’APA à domicile » est bienvenu. Nous souscrivons aussi à la proposition d’un relèvement du plafond de l’APA. La révision de la grille AGGIR est indispensable.

Elargir les périmètres des soins financés en EHPAD est une proposition à retenir ainsi qu’une réflexion sur la possibilité « d’une pharmacie à usage intérieur ».

Concernant les recettes et les besoins, nous souscrivons à la nécessité de mettre à contribution les recettes du capital. Nous rejoignons l’avis sur la progression attendue des dépenses d’autonomie et sur la crainte d’une sous-estimation des besoins. Effectivement, « un apport de recettes important de la branche autonomie est incontournable » si l’on veut répondre à la situation actuelle et anticiper. Il y a notamment le besoin de mesures financières nouvelles pour les établissements de santé, l’aide à domicile. L’embauche prévue de 50 000 ETP en EHPAD à l’horizon 2030 est insuffisante

En revanche, rappelons nos désaccords et inquiétudes :

Nous nous opposons à la suppression de l’abattement fiscal de 10 % pour les personnes âgées, ce qui aurait des conséquences dramatiques pour nombre d’entre elles. Notamment celles qui deviendraient imposables, passeraient au taux de CSG supérieur, paieraient la CRDS et la CASA, perdraient certaines aides et allocations, l’accès au logement social etc. Nous refusons une éventuelle augmentation de la CSG. De même, nous refusons l’augmentation de la TVA et celle de la CASA.

Nous refusons la mise en place d’une assurance autonomie obligatoire.

Alors que le principe même de la loi de programmation ambitieuse pour le secteur de la perte d’autonomie avait été adopté, aujourd’hui alors que la situation s’est aggravée, un projet ressurgit : celui d’une assurance autonomie obligatoire pour limiter le reste à charge des ménages. Le constat est accablant : en établissement le reste à charge est de 2 000 euros en moyenne et nombre de personnes à domicile ne dépensent pas leur plan d’aide, faute de ressources suffisantes ou de personnels. L’accès à la santé est de plus en plus difficile notamment pour les retraité·es et personnes âgées plus fragiles, contraints de payer une complémentaire de plus en plus chère pourtant indispensable pour se soigner convenablement, 4% des personnes de plus de 60 ans n’en ont pas, d’ailleurs.

Nous sommes très inquiets de la proposition de faire gérer l’APA par les caisses de retraite et de fusionner de l’APA et aide sociale des caisses de retraite : proposition qui comporte le risque de « dénaturer » les missions des caisses de retraite et de faire peser de plus en plus la prise en charge de la perte d’autonomie par les retraités eux-mêmes au travers de leurs caisses.

Estimer à 2 milliards d’euros les besoins de financements nouveaux nous semble bien insuffisant si l’on veut répondre aux objectifs précités (coût immédiat de la prévention, des mesures sur l’habitat, sur l’élargissement de l’APA et de son plafond, l’augmentation du nombre de personnels etc.). Nous aurions aimé une évaluation des besoins de financement à l’horizon 2030 d’autant plus que de très nombreux rapports ont tiré la sonnette d’alarme depuis de nombreuses années (rapport Iborra/Fiat, rapport Libault, rapport El Khomri…)

Même si nous apprécions les avancées de la Version 3 du Conseil de l’Age, reste la question majeure des pistes de financement qui sont bien vagues (taxation du capital, « autres sources de financement ») et qui évoquent l’augmentation de la CSG et n’évacuent pas clairement la « taxation » des retraité·es. Demeure le projet de la gestion de l’APA par les CARSAT qui provoque inquiétudes et opposition : la proposition d’en débattre au Conseil de l’Âge est bienvenue et indispensable.

En résumé :

Nous nous opposerons à toute mesure réduisant le pouvoir d’achat des retraités et actifs.

Nous attendons du gouvernement un PLFSS 2026 et une loi de programmation qui correspondent aux besoins !

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