La culture mobilisée ! Intervention de la FSU-Culture au conseil fédéral du 25 mars 2025

La culture mobilisée !



Contre l’épidémie de baisses de crédits dédiés à l’art et la culture qui se propage de régions en régions, de départements en départements, de villes en villes, de discours en discours et de cerveaux en cerveaux, c’est tout un secteur qui s’est mis en mouvement pour refuser le plan social dissimulé qu’il est en train de subir.

Dans les différentes régions, fortement touchées par les coupes budgétaires, les mobilisations se multiplient et s’installent durablement.

La semaine dernière, le jeudi 20 mars a été un moment fort au niveau national avec de nombreuses manifestations à Lyon, Marseille, Avignon, Le Havre, Toulouse, Tours, Nantes… En tout plus d’une vingtaine de villes ont connu des mobilisations des acteurs du monde de la culture d’une ampleur rarement vue.

La manifestation parisienne, partie de l’Opéra Bastille pour finir rue de Valois, comptait plus de 6000 manifestants dans une convergence inédite de tous les métiers de la création et du spectacle ! Elle s’est prolongée par une action surprise au Centre Pompidou, à l’appel du collectif Culture en Lutte et des syndicats : entre 100 et 200 artistes, auteurs et intermittents sont entrés dans le Centre Pompidou à 20h30. Ils n’ont hélas pas réussi à tenir leur AG en raison d’une évacuation policière musclée ordonnée par le ministère, ce qui a fait dire que « pour une fois la ministre réagit vite ». Rappelons d’ailleurs que deux jours plus tôt, mardi 18 mars à 6h00 du matin, c’est avec l’évacuation violente de près de 450 jeunes migrants qui occupaient depuis décembre le Théâtre de la Gaîté lyrique en revendiquant simplement à être hébergés dans des centres d’urgence que Rachida Dati s’était illustrée en appelant Anne Hidalgo à  « donner immédiatement l’autorisation d’évacuer » au préfet de police.

Hors Paris, Nantes est une des villes où la mobilisation pour la culture est la plus forte, suite à la baisse drastique des subventions de la région Pays de la Loire. Sa présidente, Christelle Morançais (Horizon), en transition trumpienne avancée, déclare carrément prendre pour modèle le Department of Government Efficiency (DOGE) d’Elon Musk pour gérer sa région ! Elle a ainsi supprimé trois commissions de la région sur sept dont celle de l’Environnement et celle de « Culture, Sport, Vie Associative, Egalité Homme femme…. »

En réponse à la « Thatcher des Pays de la Loire », la mobilisation du mouvement Culture en Lutte ne faiblit pas. Le Hall d’expo sur Lieu Unique (LU) en plein centre ville est occupé depuis neuf jours. Les collectifs commencent à se fédérer. Entre villes, entre départements, entre métiers de la Culture et de la Création, avec des revendications communes.

Paris, Nantes, la liste des territoires touchés par cette crise est longue. Si certaines régions (Centre Val-de-Loire, Bourgogne Franche-Comté, Auvergne Rhône-Alpes) font depuis longtemps de notables efforts pour soutenir la culture, d’autres (Ile-de-France, Nouvelle-Aquitaine, et surtout la lanterne rouge des Pays-de-la-Loire) assassinent tranquillement la création artistique. 

Un état des lieux plus précis devrait questionner également le niveau départemental. On citera par exemple le département de l’Hérault qui était parti lui aussi pour supprimer toute subvention à la culture hors subventions obligatoires (avant d’opérer un rétropédalage en demi-teinte), ce qui prouve que le PS peut lui aussi être touché par l’épidémie obscurantiste actuelle.

Mais c’est principalement d’une radicalisation à droite et d’une alliance des macronistes, de LR et de l’extrême droite traditionnelle que ces choix politiques témoignent, tant au niveau local qu’au niveau national, signe supplémentaire, s’il en fallait un, de l’encastrement du macronisme dans la droite la plus réactionnaire.

Car si la droite a toujours mené des attaques contre la création artistique, elle avait en revanche l’habitude de soutenir le patrimoine (ne serait-ce que sous la forme ringarde et élitiste de « nos châteaux – nos églises – nos Gaulois »). Aujourd’hui une page est tournée, l’inculture crasse de la droite macroniste l’incline à mener une politique dangereuse même contre le patrimoine.

On ne s’étendra pas sur la privatisation rampante de la culture, mais on peut néanmoins évoquer la part croissance du mécénat dans les grands projets de travaux des lieux prestigieux, comme ceux prévus au Grand Palais, au musée d’Orsay ou au musée du quai Branly. Comme hier à Notre-Dame et demain au musée du Louvre, là où l’État désengage les crédits les milliardaires sont appelés à participer : 20 millions d’euros du groupe LVMH au musée d’Orsay, 25 millions d’euros de la Maison Chanel au Grand Palais… Rappelons que Bernard Arnaud et l’Oréal ont chacun mis 200 millions d’euros pour la restauration de Notre-Dame.

Ne nous trompons pas : quand un milliardaire répond à l’appel de Macron pour sauver un monument ou un musée ce n’est jamais pour sauvegarder les emplois ou mettre en place un projet de démocratie culturelle, c’est pour s’offrir à bon compte une image de mécène éclairé puisque lorsque le « généreux mécène » annonce « offrir » trois millions, il faut traduire : ce sont deux millions d’impôts qui n’iront pas vers l’hôpital ou l’éducation. Merci la loi mécénat de Monsieur Aillagon…

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