Intervention du SNAC-FSU au conseil fédéral du 26 septembre 2023
Lundi 11 septembre, les directions régionales des affaires culturelles recevaient une note du ministère les enjoignant de suspendre, « sans délai » et « sans aucune exception » les projets de coopération avec les ressortissants du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Il était précisé que tous les soutiens financiers devaient être suspendus, qu’ils soient institutionnels ou associatifs. Enfin, il était désormais interdit d’inviter des ressortissants de ces pays.
Ainsi, les DRAC étaient non seulement mises en demeure de cesser toute coopération avec les artistes sahéliens, mais aussi de gendarmer dans le même sens le milieu associatif et les collectivités locales.
C’est une première ! Jamais, en 64 ans d’existence du ministère de la culture, celui-ci n’avait à ce point servi de passe-plat à l’autoritarisme d’un exécutif qui ne supporte pas que des expositions, des concerts, des représentations théâtrales, permettent l’expression sur le sol français d’artistes venus de pays dont les gouvernements déclarent indésirables la présence de troupes françaises sur leurs sols à eux.
L’oukase ministérielle visait tous les artistes de ces pays, même ceux résidant en France, même ceux qui ne professent pas de sympathies particulières pour leurs gouvernements. Tous interdits parce que ressortissants de pays qui ont déplu à Macron. On mesure la finesse d’analyse politique d’un gouvernement qui se targue de pratiquer la diplomatie culturelle et qui dégaine sans nuances à la première vexation.
Cela n’était jamais arrivé, le ministère de la Culture avait toujours pris soin de distinguer l’activité artistique des relations diplomatiques d’État à Etat, il s’agissait de deux domaines séparés.
Et tel est bien le cas lorsqu’il s’agit d’artistes proches de Melloni ou de Poutine, là pas de problème, on les accueille au nom de l’autonomie du fait artistique vis à vis de la politique. Pour l’Afrique, visiblement, c’est une autre paire de manches.
Face à cette situation scandaleuse, les syndicats du spectacle sont intervenus le mercredi 13 à travers un communiqué de presse, suivis le lendemain par nous-mêmes, les syndicats de la Culture, par une lettre adressée à Rima Abdul-Malak.
Dans les deux cas, pas de réponse directe de la ministre, mais comme on a pu le voir un rétro-pédalage assez lamentable sur RTL sur le thème de « c’est pas moi c’est les affaires étrangères » et « ne vous inquiétez pas, ces mesures ne touchent pas les ressortissants sahéliens résidant en France mais uniquement ceux qui demandent des visas », ce qui est complètement faux puisqu’on leur sucre leurs subventions.
Les pulsions autoritaires de ce gouvernement dans le champ culturel ont donc pris un tour particulièrement inquiétant, qu’il s’agisse de la discrimination honteuse visant les artistes sahéliens ou qu’il s’agisse des intimidations policières envers les journalistes dont la garde à vue d’Ariane Lavrilleux a, la même semaine, constitué un exemple tout aussi honteux.
Il nous faut donc exercer la plus grande vigilance face un gouvernement pour qui la Culture n’a rien à voir avec l’émancipation, davantage avec la marchandisation, et aujourd’hui avec la soumission.