
Apparemment, il faut encore rappeler en 2025 que notre patrimoine archéologique est une ressource limitée, fragile et non renouvelable ; que sa protection et son étude scientifique sont primordiales pour construire la compréhension et la connaissance des sociétés passées. Les vestiges archéologiques sont des biens communs universels et inaliénables !
La direction de l’Inrap et le sous-directeur de l’archéologie semblent l’avoir oublié. Comme ils oublient ce qui anime encore les agents du ministère de la Culture, le service public et l’intérêt général, la sauvegarde du patrimoine et la connaissance scientifique. Ils ne conçoivent l’archéologie que par une vision comptable étriquée, où les opérations de diagnostic archéologique, le patrimoine culturel et les agents ne sont que des ressources, des flux et des stocks.
Ces gestionnaires agissent conformément à la ligne du chef de l’État qui assenait que la crise du secteur hospitalier « n’est pas une question de moyens, mais une question d’organisation » ; on a pu constater que supprimer le nombre de lits d’hôpital ne réduit pas le nombre de malades.
Pour nous, c’est évident : réduire les possibilités pour les SRA d’émettre des prescriptions d’archéologie préventive ne sauvera pas plus de sites archéologiques… Pour eux, non.
Lors de la dernière conférence des CRA le 28 mars 2025, le sous-directeur de l’archéologie persiste dans son approche partisane, sans dialogue préalable avec les principaux concernés, les agents des SRA. Il brandit son tableau de recensement des diagnostics prescrits comme une alerte rouge et s’en sert comme d’un « document stratégique » pour réguler les politiques de prescription. Ce seul tableau aurait le pouvoir de mettre en péril le système d’archéologie préventive en France. Aux archéologues des DRAC de s’adapter aux moyens sciemment diminués alloués à l’INRAP et aux services archéologiques territoriaux.
Et le manque de financement de l’établissement public et le manque de recrutement en archéologie, on en parle ?
Nous demandons des concertations et des échanges réguliers avec la sous-direction de l’archéologie !
Faut-il encore rappeler à notre sous-directeur qu’une prescription ne donne pas forcément lieu à un diagnostic, que c’est une condition imposée à un aménagement. Elle n’aboutira à une opération que si l’aménageur le demande, mais avant, le diagnostic n’existe pas. Donc dire qu’il y a trop de prescriptions et qu’il faut en abroger est absurde !
Remettre en cause l’expertise des agents des SRA concernant leur politique de prescription et laisser entendre qu’ils seraient responsables de la situation actuelle est inacceptable. Ils veulent parler chiffres, et bien pourquoi ne pas mettre en avant que, malgré une forte augmentation en 2024 des dossiers de saisines reçus par les SRA, le taux de prescription de diagnostic n’a jamais été aussi bas. Sur l’ensemble des saisines reçues, seules 6% font l’objet d’une prescription, contre 11% en 2016 par exemple !!! Preuve que les agents des SRA ont appliqué d’eux-mêmes ce que préconise la loi 2001, à savoir une conciliation entre la protection du patrimoine archéologique et l’aménagement du territoire.
Nous demandons le respect de l’expertise scientifique des agents des SRA !
Demander l’abrogation de diagnostics « en stock » est une attaque directe à la motivation scientifique qui a conduit les agents des SRA à les prescrire ! Demander une régulation du flux, c’est ne pas tenir compte de l’effort déjà consenti par les SRA et risquer une destruction inacceptable du patrimoine archéologique !
Nous défendons notre mission de service public et de protection du patrimoine archéologique !
Le sous-directeur souhaite que le volume de prescription corresponde aux capacités opérationnelles de l’Inrap et des collectivités territoriales habilitées. Où est la logique scientifique là-dedans ? Nulle part ! Cette réflexion est purement budgétaire… Dans ce contexte de sous-financement et de sous-effectif (à l’Inrap comme dans les SRA), le sous-directeur, au lieu d’aller chercher les moyens financiers et humains nécessaires, s’attaque au code du Patrimoine, à l’esprit de la loi de 2001 et à son objectif premier, la protection du patrimoine archéologique.
Nous revendiquons des moyens à la hauteur des missions, et pas l’inverse !
Nous demandons des recrutements immédiats et réguliers à l’Inrap comme aux SRA !
Au lieu d’analyser les causes profondes de la situation actuelle, le sous-directeur pointe du doigt ses agents, sans discussion préalable, et s’entête sur les politiques de prescription. Ses solutions : loin d’être des mesures de simplification, il nous inonde de demandes, de notes, de « reporting », de mise en place « d’outils de contrôle » des prescriptions… Déjà en sous-effectifs, les agents des SRA vont bientôt passer beaucoup plus de temps à remplir des tableaux, répondre à des commandes, justifier et expliquer leur travail plutôt qu’à le faire ! Ou comment rajouter des tâches chronophages et inutiles à une organisation de travail déjà bien complexifiée suite à la fusion des régions avec une démultiplication des échelons hiérarchiques.
Nous réclamons l’amélioration de notre organisation du travail, moins de reporting, moins d’échelons intermédiaires, plus de moyens humains et des outils opérationnels !
Nouvelle trouvaille de notre sous-directeur, il estime que le caractère surfacique ne doit pas être le seul critère motivant la prescription d’un diagnostic. Comment nier les apports scientifiques fondamentaux des tracés autoroutiers, des LGV, d’un Canal Seine Nord Europe ? Appliquer la consigne du sous-directeur revient à laisser tomber les diagnostics dits « de précaution », c’est-à-dire ceux prescrits sans connaissance préalable précise de sites archéologiques. Cela nous ramènerait 40 ans en arrière où les prescriptions devaient être motivées par un site connu. La loi de 2001 a permis de dépasser cette aberration en précisant que c’est bien la présence potentielle de vestiges qui motive la prescription d’un diagnostic ! Et d’ailleurs, depuis 2001, la loi a fait ses preuves, puisque 90% des fouilles succèdent à ces diagnostics dits « de précaution ».
Autre idée de notre sous-directeur afin de baisser les moyens à mettre en œuvre au diagnostic : pour les projets aboutis, réduire l’intervention archéologique aux limites mêmes des surfaces impactées par le projet d’aménagement. C’est nier l’objectif même du diagnostic qui doit permettre d’assurer la détection et la caractérisation des vestiges. C’est cette étape qui permet ensuite à l’aménageur de pouvoir envisager, si besoin, une modification de son projet afin de préserver le patrimoine archéologique.
Ces exemples ne sont que quelques-unes des formidables idées de notre sous-directeur pour limiter nos prescriptions en dépit de l’intérêt scientifique et une énième remise en cause de la loi 2001 !
Malheureusement ses idées semblent faire des émules avec des déclinaisons locales qui sont déjà en train de voir le jour. Une note régionale, inspirées des consignes nationales, introduit deux autres domaines pour lesquels la loi 2001 ne s’applique plus : les réseaux urbains et le bâti. Dans le premier cas, la note demande de « renoncer à prescrire sur les réseaux concernant des zones pour lesquelles nous n’avons pas d’éléments suffisants pour motiver une fouille ». Donc en zone vide de connaissance, pas de diagnostic. Pour le bâti, c’est aussi la douche froide puisque le passage à la fouille directe, hors Monument Historique, ne sera plus que rarement possible. Il faudra alors chercher à introduire certaines études dans les études préalables, mais cela ne marche pas sur le non-classé : « je ne vous dit donc pas que les diagnostics sur les bâtis sont proscrits, mais il faut mieux essayer de les éviter ».
Nous revendiquons le respect de la loi de 2001 et du code du Patrimoine, avec des politiques de prescriptions à la hauteur des enjeux patrimoniaux et scientifiques !
Rappelons que le législateur a mis en place la Taxe d’Archéologie Préventive (TAP) et la Redevance d’Archéologie Préventive (RAP). En 2023, l’ordonnancement de la TAP et de la RAP se monte à 191,1 M€… Combien ont réellement été reversé à l’archéologie ? Près de 30% de ces revenus échappent au service public de l’archéologie et partent dans le budget général de l’État… Si les sommes dues étaient reversées, le système fonctionnerait et il n’y aurait pas les problèmes d’aujourd’hui.
Nous réclamons l’argent dû à l’archéologie !
Nous demandons les moyens nécessaires à l’accomplissement de nos missions !
STOP à la casse du patrimoine archéologique !
POUR la défense du service public de l’archéologie !
RESPECT des agents et des missions !
